Ora. D a décidé de porter son string art au Burkina Faso

Article : Ora. D a décidé de porter son string art au Burkina Faso
Crédit: Ora. D avec son accord.
5 avril 2024

Ora. D a décidé de porter son string art au Burkina Faso

Grâce à l’association Wekré, j’ai pris part à la 24e édition du festival Segou’art sur les rives du Niger du 30 janvier au 04 février 2024 en tant que critique d’art. Wekré a soigneusement choisi dix artistes plasticiens pour participer à l’exposition off du festival, et parmi eux se trouvait DEGBEKOUTO Debora Ami plus connu sous le nom Ora. D, une artiste que j’ai eu le privilège de côtoyer personnellement.  En tant que membres de la même délégation, nous avons entrepris ensemble le voyage depuis Ouagadougou jusqu’à Ségou.

Durant ce trajet, nous avons partagé des moments d’échanges enrichissants sur sa démarche artistique et les motivations qui sous-tendent son art. Ces discussions ont été autant des fenêtres ouvertes sur son processus de création que des invitations à pénétrer dans son univers artistique singulier. Dans ces moments privilégiés, Ora. D a révélé les inspirations qui guident son travail, ainsi que les défis auxquels elle est confrontée en tant qu’artiste contemporaine évoluant dans un contexte culturel et social en constante évolution.

Cette rencontre durant notre périple vers le festival a non seulement enrichi ma compréhension de son art, mais a également renforcé mon appréciation pour la diversité et la richesse des expressions artistiques contemporaines en Afrique. La fusion de nos perspectives et la symbiose de nos idées ont contribué à tisser des liens artistiques et humains qui ont transcendé les frontières géographiques et culturelles, témoignant ainsi du pouvoir universel de l’art à connecter les individus et à susciter des dialogues profonds et significatifs.  

Le voyage de Ora. D dans le string art

Ora. D a découvert l’art du string art au cours de ses explorations artistiques. Originaire du Togo, elle réside désormais au Burkina Faso depuis près de deux ans. C’est à son arrivée dans ce nouveau pays qu’elle a commencé à s’adonner au string art en 2022, attirée par son penchant pour le bricolage, son amour pour la couleur et son désir insatiable de créativité. Ce sont ces passions qui l’ont incitée à se lancer dans cette forme d’art unique.

Le string art, qu’elle définit comme l’art à la corde ou à la ficelle, est devenu pour elle bien plus qu’une simple activité artistique. C’est devenu un moyen d’expression à part entière, un canal à travers lequel elle peut donner vie à ses idées les plus audacieuses et les plus inspirantes. Chaque ligne de corde, chaque nœud, chaque motif soigneusement élaboré représente pour elle une opportunité de transmettre des émotions, de raconter des histoires et d’explorer les frontières de la créativité.

Le string art est devenu son langage visuel, son moyen de communiquer avec le monde qui l’entoure. C’est une forme d’expression qui lui permet de fusionner ses passions et ses talents, de mêler habilement l’artisanat et l’art, créant ainsi des œuvres qui captivent l’imagination et qui suscitent l’admiration. Pour Ora D, le string art est bien plus qu’une simple pratique artistique ; c’est une passion dévorante, une source infinie d’inspiration et une voie vers la réalisation de soi.

Le Burkina Faso comme terre d’accueil pour sa carrière artistique

Ora. D a délibérément choisi le Burkina Faso comme terre d’accueil pour sa carrière artistique. Pour elle, ce pays incarne des valeurs d’hospitalité, d’intégrité et surtout de richesse culturelle. « Je suis convaincue que le Burkina Faso constitue l’endroit idéal pour donner un élan à ma passion artistique ». En effet, l’art y est profondément enraciné, avec des marchés d’art renommés tels que Wekré , le marché d’art contemporain de Ouagadougou ,les rencontres Internationales des peintures de Ouagadougou (RIPO)  et une pléthore de festivals dédiés à l’expression artistique. « En m’installant ici, j’ai vu l’opportunité d’introduire le string art dans cette riche scène artistique »

La réaction du public a été des plus encourageantes. Les gens étaient intrigués par cette nouveauté. « Je me souviens encore de ma première exposition-vente en décembre 2022. Lorsque j’ai présenté l’un de mes tableaux au public, l’accueil a été chaleureux et les réactions ont été positives ». Il y a eu un véritable engouement autour de son travail, ce qui l’a profondément motivée à poursuivre dans cette voie.

Cette réaction enthousiaste du public a été pour elle une validation de son choix de carrière et une source d’inspiration inestimable. « Elle m’a encouragée à redoubler d’efforts, à explorer de nouvelles idées et à affiner ma technique ». Grâce à cette interaction avec le public burkinabè, elle a pu comprendre l’impact profond que l’art peut avoir sur les gens et sur la société dans son ensemble. Cela l’a également permis de tisser des liens précieux avec la communauté artistique locale, renforçant ainsi son sentiment d’appartenance à cette terre d’accueil si généreuse envers les artistes.

Les difficultés rencontrées sur le chemin de l’art du string selon Ora. D

En parallèle avec les éloges, il y a toujours ceux qui considèrent son travail comme un simple divertissement. Chacun exprime son point de vue, et désormais, en tant qu’artiste, il lui incombe de tirer le meilleur de ces opinions et de les utiliser pour progresser. « Tout cela fait partie de mon parcours d’apprentissage. Je suis consciente que je suis encore au début de mon chemin artistique, et chaque expérience, positive ou négative, est une occasion d’apprendre et de grandir. J’ai pour ambition de partager mes connaissances et de former d’autres personnes pour promouvoir le string art, mais pour l’instant, je suis moi-même en phase d’apprentissage ».

C’est à travers son travail, ses réalisations et sa passion qu’elle peut espérer changer les perceptions à l’égard du string art. Chaque pièce qu’elle crée est une affirmation de son engagement envers cette forme d’art unique et une invitation à ceux qui doutent à découvrir toute sa profondeur et sa beauté.

 L’art du String selon Ora. D

En tant qu’artiste du string art, ces matériaux de prédilection sont les contreplaqués épais, les clous, les fils de soie et de coton, ainsi que les fils de broderie. En complément, elle incorpore parfois également de la peinture dans ces œuvres.

« Au commencement, je travaillais avec des planches de similicuir associées aux fils. Cependant, au fil du temps et grâce aux conseils avisés des autres, j’ai réalisé que le similicuir n’était pas un matériau durable dans le temps, susceptible de s’abîmer. C’est pourquoi j’ai cessé son utilisation et me suis tournée vers l’utilisation exclusive de la peinture sur bois, offrant ainsi une durabilité et une qualité accrues à mes créations. Pour la réalisation de mes œuvres en string art, je privilégie généralement les formats 80/60 et 100/80. Ainsi, la création d’une pièce peut demander une à deux semaines, selon sa taille et sa complexité. Pour les formats plus petits, je peux achever une œuvre en aussi peu que trois jours à une semaine ».

Ce processus de création, associé à la sélection minutieuse des matériaux, reflète la recherche constante de qualité et d’authenticité dans son travail artistique. Chaque étape, de la conception à la réalisation finale, est empreinte de soin et d’attention aux détails, résultant en des œuvres qui captivent par leur finesse et leur profondeur.

Le string art transcende les frontières conventionnelles de l’expression artistique en démontrant qu’il est possible de créer des œuvres d’art avec des moyens autres que la peinture ou la sculpture traditionnelle. Il représente un prolongement authentique de l’art, explorant de nouveaux territoires esthétiques et conceptuels. Le string art, par sa nature même, incite à développer la perception des couleurs, à stimuler la pensée abstraite et à susciter des émotions profondes. « Il demande de la patience, de l’attention et de la diligence, tout en offrant une expérience artistique originale et authentique, bien que parfois associée au domaine du design.

« La plupart de mes œuvres traitent du thème de la résilience. Elles incarnent la nécessité de guérir du passé pour pouvoir avancer. Personnellement, j’ai traversé des épreuves difficiles pour parvenir à là où je suis aujourd’hui. Je sais que beaucoup d’autres personnes traversent également des moments difficiles ». Ainsi, à travers ses créations, elle cherche à offrir de l’espoir aux gens. Son art est thérapeutique, à la fois pour elle-même et pour ceux qui contemplent ses œuvres.

Aspirations et Projets de Ora. D

« Jusqu’à présent, je n’ai pas eu l’occasion de rencontrer d’autres spécialistes du string art dans la sous-région. Pourtant, j’ai grandement envie de les rencontrer afin de bénéficier de leurs conseils et de participer à des formations, à l’image de ce qui se fait dans le domaine de la peinture ». L’absence de communauté spécialisée dans le string art peut parfois être décourageante, car il est difficile de trouver la même motivation lorsque l’on est le seul à pratiquer cette forme d’art. Il est importance de créer des liens avec d’autres artistes partageant la meme passion.

Le string art demeure largement méconnu dans la sous-région. Contrairement à la peinture, il ne jouit pas de la même popularité. « Mon souhait est que le string art devienne aussi répandu et intégré dans l’apprentissage des arts plastiques. Je sais que dans d’autres pays comme le Nigeria, le Congo et la Côte d’Ivoire, il existe des pratiquants du string art, bien que leur nombre reste limité ».

Elle nourrit également des projets ambitieux pour promouvoir le string art auprès des jeunes, dans des ONG et des orphelinats afin d’organiser des ateliers et des formations.

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